Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/115

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la tribune, expliquant que les prisons regorgeaient d’anarchistes et que cela était dû à toute l’agitation folle qu’on créait ; il ajoutait que si chaque individu demeurait libre de vivre à son gré, du moins ne fallait-il pas transformer certains moyens d’action en but et en idéal.

Garnier se dressa alors et, dans la salle déjà houleuse, lui cria :

— Vendu !

Carouy lui tendit un poing menaçant. Quant à Callemin, il assura les camarades que Kibaltchiche était un bourgeois timoré (on ne disait pas encore petit bourgeois), une sorte d’aristocrate rêveur qui restait incapable de se défaire de ses tares, de son éducation, de son hérédité et qu’en somme, il convenait de ne pas le prendre au sérieux.

Car Callemin, surnommé Raymond la Science, était le véritable théoricien de la bande. Il avait lu énormément. Son intelligence très vive lui permettait de s’assimiler rapidement à peu près tout ce qui lui tombait sous les yeux. Malgré cela, il demeurait un primaire indécrottable. C’est ce qui explique que certaines lectures peuvent agir désastreusement sur un esprit. Il manquait, de plus, de méthode et, parfois, faisait montre de partis pris exaspérants, surtout sur des sujets qu’il connaissait très imparfaitement.

Rirette Maîtrejean, qui écrivit, voici quelques années, une poignée de souvenirs sur les bandits avec lesquels elle vécut longtemps, nous a ra-