Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/159

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peut constamment rentrer ses griffes et tendre son échine aux coups de trique…

« …Et un matin, il sort de son taudis, il vole une auto, tue un gardien de recettes, abat un gardien de la paix, et écrase les autres.

« Il est devenu l’Illégal, l’Endehors. Braves rentiers satisfaits d’en haut et d’en bas, prenez garde à vous. »


Cette page, qui fut publiée au moment même où les bandits poursuivaient le cours de leurs exploits, jette une lumière crue sur les mobiles vrais qui les firent agir[1]. À la base, l’instinct de révolte puis beaucoup de lassitude, le mépris des prophètes et des théoriciens révolutionnaires, le besoin ardent de vivre, de jouir de la vie, coûte que coûte… Et, une fois le doigt dans l’engrenage, toute l’âme y passant. La bête fauve se réveillant dans l’homme, dans le rêveur d’hier. Celui qui aurait pu devenir un apôtre se transformant en bandit.

Les ravages qu’ont fait certaines théories parmi des milliers de jeunes gens enthousiastes sont incalculables.

Pour avoir sacrifié à l’idole illégaliste, les anarchistes ont peuplé les bagnes et les prisons ; ils sont devenus la chose des geôliers et des chaouchs.

Singulière méthode pour réaliser sa vie.


  1. Elle parut dans la Guerre Sociale. Elle était signée : Victor Méric.