Page:Méric - Les Bandits tragiques.djvu/228

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Sur Garnier. — Fort jeune et très beau. Il a la figure franche et rieuse. Sûr de lui. N’a pas la notion de la peur. Ignore le mot et la chose. Ambidextre très adroit. De l’avis de tous ceux qui l’ont connu, il était seul capable, entre tous les illégaux, d’attaquer le garçon de recette Caby. Il a vingt-deux ans. Mais depuis l’âge de quatorze ans, il travaille comme terrassier, boulanger ou métallurgiste, toutes corporations révolutionnaires comme on sait.

Intellectuellement, pas de culture. Mais, à l’encontre de Bonnot, il aime discuter les idées ; il en parle peu, mais sensément. Il a une règle de vie absolument saine, penche pour le végétarisme, boit de l’eau. Il lit peu et seulement les journaux. Comme Bonnot, il aime le théâtre, mais alors que le premier aime aussi le music-hall, le café, le concert, le casino, Garnier les ignore. Il préfère les sports, où il se montre fort adroit, supérieur comme tous les ambidextres. Moralement, très supérieur à Bonnot dans ses relations avec ses pairs, où il compte des amis. Il donne facilement aux pauvres, aux femmes, adore les enfants, secourt les vieillards, les faibles.

Par contre, inférieur à Bonnot dans le respect de la vie humaine. Il compte pour rien les hommes qui ne sont pas de ses idées ou même d’idées assez proches. C’est lui, toujours lui, qui tuera le premier, avec un manque absolu de sensibilité. Il se disputera même avec Bonnot parce que celui-ci lui reprochera ses crimes en termes vifs et l’appellera « terrassier, machine à bosseler, chaussette à clous, bête à tuer ». « Pas de témoin », répond-il. Ce qui fera hausser les épaules à Bonnot.

Garnier a l’œil grand ouvert, le regard aigu, mais non pas perçant comme Bonnot. Ce portrait de Garnier est connu dans les milieux anarchistes où il vécut, au moins quatre ans.


Sur Callemin. — Callemin, dit Raymond la Science, est d’une espèce très différente. Il n’est lié avec les deux premiers que pour le résultat. De même que Bonnot, il traitera souvent Garnier de « brute épaisse ». Callemin y sera sensible, rompra, puis reviendra.

Callemin est petit, fort et trapu. Il fait du sport. Mais il est myope. Glabre et rose, un témoin l’appellera aux assises, « Bébé rose », ce dont on rira, lui le premier. Car il a de l’esprit jusqu’au bout des ongles. On l’a vu au travail de l’Anarchie, à l’étude. Il est particulièrement fort sur l’in-