Page:Mérimée - Carmen.djvu/315

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

je cligne des yeux. La nuit était plus noire qu’une prison ; et dehors, un temps de chien.

Je la guigne. Ma commère saute tout doucement à bas du poêle, elle me tâte ; je fais le dormeur ; elle s’assied devant le poêle, souffle sur un charbon.

Et allume un bout de chandelle. Pour lors, dans un coin, sur une planche, elle déniche un flacon ; puis, s’asseyant sur le balai devant le poêle,

Elle se déshabille nue comme la main. Ensuite elle avale trois gorgées du flacon… aussitôt, à cheval sur un balai, elle enfile le tuyau de la cheminée, et bonsoir ! la voilà partie.

Ha ! ha ! me dis-je là-dessus. C’est donc que la commère est une païenne ? Attends, ma petite colombe. — Je saute à bas du poêle, et j’avise le flacon.

Je flaire, cela sentait l’aigre. Pouah ! j’en jette deux gouttes à terre. Bon ! voilà la pelle, puis après un baquet, qui s’envolent par le poêle. — Je me dis : Cela se gâte.

Je regarde ; sous un banc dormait un matou. Je lui en jette une goutte sur le dos. Ft, ft ! comme il jure ! — Au chat ! dis-je… Voilà mon matou après le baquet.

Alors à tort et à travers j’arrose la chambre dans tous les coins ; tant pis qui en attrape ! et aussitôt chaudrons, bancs, tables, au galop ! tout gagne le poêle et disparaît.