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montagnes, et de le faire renoncer aux sinistres desseins qui le ramenaient dans son île. Depuis qu’elle avait pris la peine de l’étudier, elle s’était dit qu’il serait dommage de laisser ce jeune homme courir à sa perte, et que pour elle il serait glorieux de convertir un Corse.

Les journées pour nos voyageurs se passaient comme il suit : le matin, le colonel et Orso allaient à la chasse ; miss Lydia dessinait ou écrivait à ses amies, afin de pouvoir dater ses lettres d’Ajaccio. Vers six heures, les hommes revenaient chargés de gibier ; on dînait, miss Lydia chantait, le colonel s’endormait, et les jeunes gens demeuraient fort tard à causer.

Je ne sais quelle formalité de passe-port avait obligé le colonel Nevil à faire une visite au préfet ; celui-ci, qui s’ennuyait fort, ainsi que la plupart de ses collègues, avait été ravi d’apprendre l’arrivée d’un Anglais riche, homme du monde et père d’une jolie fille ; aussi il l’avait parfaitement reçu et accablé d’offres de services ; de plus, fort peu de jours après, il vint lui rendre sa visite. Le colonel, qui venait de sortir de table, était confortablement étendu sur le sofa, tout près de s’endormir ; sa fille chantait devant un piano délabré ; Orso tournait les feuillets de son cahier de musique, et regardait les épaules et les cheveux blonds de la virtuose. On annonça M. le préfet ; le piano se tut, le colonel se leva, et présenta le préfet à sa fille : — Je ne vous présente pas monsieur della Rebbia, dit-il, car vous le connaissez sans doute ?

— Monsieur est le fils du colonel della Rebbia ? demanda le préfet d’un air légèrement embarrassé.

— Oui, monsieur, répondit Orso.

— J’ai eu l’honneur de connaître monsieur votre père.

Les lieux communs de conversation s’épuisèrent bientôt. Malgré lui, le colonel bâillait assez fréquemment ; en sa qualité de libéral, Orso ne voulait point parler à un satellite du pouvoir ; Miss Lydia soutenait seule la conversa-