Page:Müller-Simonis - Du Caucase au Golfe Persique.pdf/352

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
268
CHAPITRE XV

Bien que menée aussi secrètement que possible, l’affaire fit du bruit. Pour faire une enquête sans éclat, le Consul russe organise bientôt après une partie de plaisir au Varak. — Les dégâts causés par la police dans l’église étaient à peine réparés ; la trace s’en voyait distinctement ; la bibliothèque était fermée. La présence du Consul de Russie eût dû paraître aux moines une bonne occasion de se chercher un protecteur. Eh bien, le supérieur (actuellement à Van), interrogé par le Consul eut une telle peur de se compromettre vis-à-vis du gouvernement turc, qu’il nia effrontément perquisitions et dégâts !

Ce sont malheureusement là des traits trop fréquents dans le caractère arménien, et qui seront un grand obstacle à l’émancipation de ce peuple.

Revenons à Hyvernat. Il était en train de copier son inscription, quand soudain un craquement se fait entendre. — Merveilleux hasard — la porte de la bibliothèque, à laquelle Hyvernat n’avait pas touché, s’abat comme par enchantement ! Les pauvres religieux, un moment épouvantés, ne se tiennent maintenant plus de joie ! Ils peuvent de nouveau pénétrer dans leur bibliothèque et essayer d’y remettre de l’ordre — chose bien nécessaire — car la police a ouvert toutes les armoires, jeté les livres pêle-mêle dans tous les coins de la salle ; démoli à moitié la toiture, et ensuite, sans plus de cérémonie, fermé la porte, laissant la pluie et les rats achever son œuvre de destruction.

Innocents coupables d’une violation de scellés, nous allons tous vite en besogne, les moines à ranger leurs livres et nous à les examiner. Ils ont environ 150 manuscrits qu’ils disent fort précieux ; ils paraissent en effet assez anciens autant que notre rapide examen nous permet d’en juger.

Dans un coin je vois les débris de la moissonneuse dont j’ai parlé dans le chapitre précédent.

La visite terminée, nous réussissons heureusement à remettre la porte en place, sans laisser aucune trace de notre passage. Au retour, nous passons par le vieux couvent de Schouchantz,