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CHAPITRE XXVI

des sommes énormes. Aussi, pour faire face à toutes ces exigences, est-il obligé de faire flèche de tout bois, et accepte-t-il de ses sujets des cadeaux qui sont à tout le moins compromettants pour un souverain.

Afin d’augmenter leurs ressources, les derniers Sultans, mais Abd-ul-Hamid surtout, ont cherché à arrondir les domaines impériaux par des acquisitions avantageuses, et il faut reconnaître qu’ils y ont réussi à souhait. Sa Majesté désire faire un achat ; un sujet dévoué peut-il hésiter un instant à faire à son gracieux souverain les meilleures conditions, surtout quand ce gracieux souverain est, au fond, maître de s’approprier le tout sans payer ?

Aussi bien ; ces domaines se sont-ils démesurément agrandis ; dans le seul vilayet de Môsoul, les revenus en dépassent 800 000 fr. On estime que la moitié du vilayet de Baghdad appartient au Sultan en propriété privée. On a eu soin de choisir partout les meilleures terres, et, — la chose est à noter — les revenus de ces domaines rentrent beaucoup plus exactement que ceux de l’Empire. Malheureusement ils vont tous à la caisse privée du Sultan, appauvrissant d’autant le Trésor.

Quant aux conditions d’achat, elles touchent à l’invraisemblable. On estime qu’en thèse générale, le prix d’achat des terres représente la moitié du revenu d’une année, autrement dit, une terre rapportant mille francs par an, est achetée pour un capital de cinq cents francs ! voici textuellement ce que m’écrit un de mes correspondants, homme très sérieux : « Relativement aux propriétés achetées par Sa Majesté notre auguste Souverain le Sultan Abd-ul-Hamid-Khân, il est très difficile d’en savoir le nombre ou les recettes qu’elles donnent, pas plus que les sommes auxquelles elles ont été achetées. Je vous donnerai seulement un exemple connu de tout le monde, duquel vous pourrez en juger. La propriété, dite El-Djehalla, située dans le Sandschak d’Amara, dépendant du vilayet de Bassorah a été achetée, dit-on, au prix de 5 000 livres turques. Cette propriété