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UNE FRANÇAISE AU PÔLE NORD

derait suffisamment pour une future campagne de navigation, si la mer s’ouvrait de nouveau devant son aventureuse hardiesse.

Grâce aux mesures prises longtemps à l’avance et minutieusement calculées, le débarquement des principaux explorateurs fut terminé en vingt-quatre heures. La bordure cristalline du fiord n’était pas de plus de 6 milles en largeur, et telles étaient encore l’épaisseur et la solidité de la glace, qu’on y pouvait défier toute influence de la débâcle extérieure. Ces croûtes du littoral sont fixées là depuis des siècles, et leurs assises reposent, selon toute apparence, sur le roc même, où elles forment une console dominant de deux ou trois mètres le niveau des eaux libres. Pour plus de sécurité, Bernard Lacrosse fit procéder, dès l’abord, à un sondage, qui accusa le fond à vingt-cinq brasses sur une corniche de syénite et de roches schisteuses. Il était manifeste que la côte se relevait en pente très douce jusqu’à l’affleurement du sol.

En même temps que les voyageurs, on débarqua les diverses pièces de bois numérotées qui allaient permettre la rapide construction du baraquement destiné à abriter les explorateurs restant à terre. Là encore, l’exercice, précédemment répété, du montage et du démontage des poutres, arcs-boutants, voliges, murailles et cloisons de la maison de bois, procura une économie de temps vraiment merveilleuse. La douceur exceptionnelle de la température, accusant, de midi à trois heures, 9 degrés centigrades, et 5 entre minuit et trois heures du matin, favorisa les travaux. En six heures, le Fort Espérance — ainsi l’avait-on dénommé d’avance — fut paré pour recevoir les douze personnes qui descendaient à terre, à savoir : M. de Kéralio, sa fille Isabelle, son neveu Hubert d’Ermont, la bonne Tina Le Floc’h, nourrice et suivante d’Isabelle, le docteur Servan,