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charmante Bataille des fleurs, qui se termine sur cette judicieuse remarque :

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Si les peuples étaient plus sages,
Les jours qu’ils ne sont pas d’accord,
Le canon tairait ses orages,
Les vaisseaux resteraient au port.

Le moment venu d’en découdre,
Ce serait sans deuils et sans pleurs :
Au lieu de brûler de la poudre,
On se battrait avec des fleurs.

En dépit de l’état de prostration dû à la maladie, il n’abandonnait pas son passe-temps de prédilection, et environné de fioles, de médicaments, de médecins et d’ordonnances, il trouva là matière à la plus cocasse des plaisanteries. Cela prit la forme d’une thèse médicale sur le Mal aux cheveux et la Gueule de bois présentée à la Faculté de Montmartre. La chanson du Mastroquet de Suresnes est tirée de cette thèse, au chapitre Étiologie. Ce fut là sa dernière œuvre.

Ceux qui savent susciter le rire possèdent, seuls peut-être, l’heureux privilège d’être aimés pour eux-mêmes. On les recherche, on les choie, parce qu’ils créent de la joie et endorment pendant quelques instants le souci de vivre. Quand ils disparaissent, l’arôme de leur personnalité leur survit, et on les aime encore après leur mort pour la bonne humeur qui règne dans leurs œuvres. Mac-Nab fut de ceux-là. Artiste peu soucieux des nécessités de l’existence, mais très fier, il vécut toujours très dignement. Il fut toujours le plus serviable des amis, et laissa, j’en suis sûr, moins d’obligations que d’obligés. Sa dernière préoccupation, quand il s’éteignit à l’hôpital de Lariboisière, fut la publication de ses chansons. Aujourd’hui, son vœu est réalisé : l’artiste Kam-Hill les a popularisées dans les grands concerts de Paris, et les éditeurs du Ménestrel n’ont rien épargné pour qu’elles fussent présentées au public avec luxe et coquetterie. Nous saisissons avec joie l’occasion qui nous est offerte de les en remercier au nom du poète disparu et au nom de la vieille gaieté française.

Donald MAC-NAB.