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INTRODUCTION LXXV


çais du moyen âge[1] ; Machaut peut avoir puisé directement à cette source, en transformant en fait réel ce qui n’était qu’une supposition chez le poète latin.

L’histoire de Thésée et d’Ariane (v. 2707-69 et 2805-08). Les aventures de Thésée, son combat avec le Minotaure, le rapt et l’abandon d’Ariane, ne paraissent pas avoir été traitées en langue française avant Machaut[2]. Aussi le poète se voit-il dans la nécessité d’en donner un récit complet et détaillé. Il reproduit fidèlement les données essentielles de la tradition gréco-romaine : Androgeüs, fils du roi de Crète, Minos est tué par les Athéniens. Son père impose à la ville vaincue un tribut de victimes humaines qui sont dévorées « par un monstre trop mervilleus » (le Minotaure que Machaut ne désigne pas par son nom). Theseüs, fils du roi d’Athènes, va combattre le monstre et remporte la victoire, grâce au secours d’Adriane, la fille de Minos, à qui il promet le mariage. Il l’enlève, mais l’abandonne en route,

  1. G. Paris, Histoire littéraire de la France, XXIX (1885), 488-89.
  2. R. Dernedde, dans son étude, malheureusement fort incomplète, Ueber die den altfranz. Dichtern bekannten epischen Stoffe ans dem Altertum (1887, p. 96), relève une allusion à ce récit pour la première fois dans les Œuvres du roi René (éd. Quatrebarbe, III, 108), un siècle après Machaut. Jean de Meun (Roman de la Rose, v. 8898-8904) avait parlé de la descente de Thésée aux enfers, empruntant probablement ses renseignements aux mythographes latins (voy. Langlois, Origines et sources du Roman de la Rose, 1890, p. 134). Rappelons aussi que certains traits de la légende de Tristan offrent une analogie si frappante avec la légende de Thésée qu’il est difficile d’écarter l’hypothèse d’emprunts directs faits par quelque poète médiéval à la légende grecque (voy. Bédier, Le Roman de Tristan, par Thomas, II, 1 35-140). Nous ignorons si le récit ne figure pas déjà dans l’Ovide moralisé (voy . plus bas, p. lxxix ss.).