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ELEGIE XIII.
DE FONTAINEBLEAU.


Par les sablons, par les roches désertes,
Dont les os durs ces chateaus ont murés,
     Par les hautes etables vertes
     Des cerfs, du vilain asseurés,
Maigre, ennuie, lassé me repromene
Chargé du soin qu’à nos Dieppoys je doi,
     Mais, surtout, me poise la pêne
     D’estre, Sibille, loin de toi.
Ni les jardins, ni la fontaine vive,
Nommant ce lieu du nom de sa bell’eau,
     Ni l’Estan, ni sa fraiche rive,
     Ni des pavillons le plus beau,
Ni les couleurs des longues galeries,
Qui, la vois prés, monstront un monde vif,
     Ni les riches tapisseries,
     Ni bronze, ni marbre naïf,
A eus mon œil tellement ne ravissent
Qu’à toi tousjours ne soupire mon cueur :
     Ains à chaque pas rafraichissent
     Les memores de ma langueur.
Soir et matin, que ces bois je trépasse,
Ninfes, di-je, et Satires pelus,
     Qui ci dans mainte fosse basse
     Couplés vos amours dissolus,
Peussé-je au moins, main en main, sous cete ombre,
Quelques cent pas avec madame aller,
     Poussions nous, bouche à bouche, un nombre
     D’honnestes paroles méller.
Voyant bondir ces sources éternelles
Du roc moussu, qui pas ne semble feint,
     Ah ! di-je alors, combien de telles
     Ce mien feu n’auroient pas esteint.
Voiant partout la devise roiale,
Geste Salmandre au feu se nourrissant,