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dant les jours glacés, la substance transformée de l’été. La reine est au milieu, entourée de sa garde. Le premier rang des ouvrières se cramponne aux cellules scellées, un second rang les recouvre, recouvert à son tour d’un troisième, et ainsi de suite jusqu’au dernier qui forme l’enveloppe. Lorsque les abeilles de cette enveloppe sentent le froid les gagner, elles rentrent dans la masse et d’autres les remplacent à tour de rôle. La grappe suspendue est comme une sphère tiède et fauve, que scindent les murailles de miel, et qui monte ou descend, avance ou recule d’une manière insensible à mesure que s’épuisent les cellules où elle s’attache. Car, au contraire de ce que l’on croit généralement, la vie hiémale des abeilles est alentie mais non pas arrêtée[1]. Par le bruissement concerté de leurs ailes, petites sœurs survivantes des flammes ensoleillées, qui s’activent ou s’apaisent selon les fluctuations de la température du dehors, elles entretiennent dans leur sphère une chaleur invariable et égale à celle d’une journée de printemps. Ce

  1. Une forte ruchée, pendant l’hivernage, qui dans nos contrées dure environ six mois, c’est-à-dire d’octobre au commencement d’avril, consomme pour l’ordinaire vingt à trente livres de miel.