Page:Maindron - Dans l’Inde du Sud.djvu/84

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les bayadères vinrent et commencèrent de chanter. Elles étaient là cinq ou six, jeunes, assez petites, très noires, et vêtues avec un luxe qui dépassait de beaucoup leur beauté. Leurs caleçons de satin clair quadrillé d’or retombaient sur les lourds anneaux d’argent qui cerclaient leurs chevilles ; leurs pagnes de soie bridant les cuisses, suivant l’usage, puis ramenés en avant, s’élargissaient en queue de paon ; les manches courtes de leurs petits corsets rejoignaient les gros bracelets coudés d’or fin qui ornaient les arrière-bras. Leurs mains, jaunies de curcuma aux paumes, étaient à ce point chargées de bagues, qu’on eût dit de chacune un écrin ouvert. Leur face brune, entourée d’orfèvrerie, éclairée par les boucles et les boutons de nez, les anneaux et les pendants d’oreilles, les fronteaux et les gourmettes d’or, apparaissait plus sombre entre les houppes de jasmin qui tombaient des tempes.

Alors le chef de l’orchestre annonça que les bayadères ne danseraient point, et cela parce que le char de Çiva se trouvait enlizé dans le sable, juste devant la mairie. En effet, les bayadères ne pouvaient se livrer à des danses profanes sous les regards du dieu qui, suivant son