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chap. 2e.
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DEGRÉS DE FERTILITÉ DES TERRES.

nière à pouvoir facilement être mêlée avec le sol.

Sous un terrain argileux ou glaiseux on trouve aussi quelquefois une couche de terre sablonneuse : si elle n’est placée ni trop près de la superficie du sol, ni à une trop grande profondeur, c’est-à-dire si elle est à trois ou quatre décimètres (1 pied ou 1 pied ½) au-dessous de la surface, et si sa couche est assez épaisse, elle produit un sol éminemment fécond, qu’on qualifie de pesant et chaud tout à la fois, qui ne souffre jamais de l’humidité en en laissant toujours écouler la partie surabondante.

Le sol où la terre végétale n’a qu’une petite épaisseur et recouvre une couche inférieure de sable, est fortement exposé aux sécheresses, lors même qu’il parait très-fertile dans les saisons humides.

Quelquefois la couche de sable ou de gravier est très-mince, et recouvre elle-même une couche d’argile imperméable. Si le terrain n’a pas de pente, l’eau s’amasse dans la couche de sable comme dans un réservoir et reflue vers la surface ; alors il s’y forme des fondrières, des places humides, le terrain devient froid et stérile, parce que l’eau entraine les particules d’engrais dissoutes, et les dépose dans la couche de sable où elles sont à peu près perdues pour la végétation. Cette espèce de terrain est une des plus mauvaises, si on ne l’améliore par des saignées qui fournissent un écoulement à l’eau : mais à l’aide de ces saignées, ce terrain peut être complètement corrigé.

Plus le sable qui est au-dessous d’un sol déjà sablonneux est sans fond et mouvant, plus ce terrain est sec. Si à une certaine profondeur, le sable prend plus de consistance, et que l’écoulement de l’humidité soit ainsi un peu arrêté, le sol a plus de fraîcheur et est meilleur.

Quelquefois, surtout dans les montagnes et sur les plateaux des collines de formation tertiaire, le sous-sol est composé de pierres qui ne laissent souvent qu’une épaisseur de quelques pouces à la couche végétale. — Lorsqu’il est composé de pierres à chaux, c’est la circonstance la plus favorable ; à la superficie de la couche, cette pierre est le plus souvent délitée et pleine de crevasses ; elle absorbe l’eau, et les racines des plantes, notamment du sainfoin et des arbres et arbrisseaux, y pénètrent très-bien. Les roches calcaires et gypseuses sont donc moins stériles que les autres.

Le schiste argileux, couvert d’une légère couche de terre végétale, se délite lorsque la charrue l’entame ou enlève des morceaux ; on peut ainsi rendre plus profonde et améliorer la couche arable.

Le terrain qui n’a que peu d’épaisseur, et qui recouvre le granit et autres roches presque indécomposables, ne peut s’améliorer qu’en y transportant de la terre végétale ou des déblais et démolitions pour en augmenter la couche.

Lorsque la couche inférieure est composée de cailloux roulés, s’ils sont suffisamment recouverts de terre végétale, ils ne sont pas nuisibles ; et même, si le terrain est argileux, ils peuvent être très-utiles en procurant un écoulement aux eaux surabondantes.

L’ocre ou la mine de fer limoneuse, que l’on trouve assez fréquemment au-dessous de la superficie du sol, est très-nuisible à la végétation, qu’il empoisonne, pour ainsi dire, lorsqu’il n’est pas recouvert d’une couche de terre végétale assez épaisse pour qu’il ne soit pas atteint par les racines. Il est ordinairement au-dessous d’une couche de terre âpre et de couleur brune, de même nature que lui, qui devient plus dure à mesure qu’elle descend, et est enfin transformée en pierre. Les arbres dépérissent aussitôt que leurs racines atteignent cette terre. 25 fév. 1834. — L. Héricart de Thury

Section VI. — De la phorométrie, agronométrie, statique agricole, ou du degré de fertilité des terres.

On désigne sous ces noms la méthode par laquelle les Allemands ont cherché, dans ces dernières années, à mesurer exactement les variations de la fécondité du sol, à les évaluer en chiffres, et à les rendre comparables en les rapportant à une commune échelle. Thaër a le premier ouvert cette voie, que de Wulfen et de Voght ont ensuite élargie et affermie.

Thaër suppose qu’une terre qui donne annuellement, dans une récolte moyenne, 12 hectol. 84 de froment par hectare, possède 100 degrés de fécondité, suppléant, par ce mot abstrait, à tout ce que nous ignorons des qualités réelles du sol. Ces 100° ne sont pas épuisés après la récolte, mais ils ont subi une diminution ; et, pour reconnaître la valeur de cet abaissement, Thaër a eu recours à deux procédés qui se sont contrôlés l’un l’autre : 1o il a pris l’ensemble des résultats fournis par des exploitations bien dirigées dans des années moyennes ; 2o il a aussi fondé ses déductions sur les analyses qu’Einhof a faites de différentes céréales, d’après le principe que les récoltes absorbent les sucs nourriciers contenus dans le sol en proportion directe de la substance nutritive qu’elles-mêmes contiennent, surtout dans leurs graines. Au moyen de ces deux ordres de considérations, il a trouvé qu’une récolte qui succéderait immédiatement et sans engrais à celle que nous avons prise pour type, produirait 7 hectol. 70 du même grain ; d’où il a déduit, par une simple règle de proportion, un épuisement de 40 p. 0/0 sur la première récolte. Par le même procédé, il a été conduit à attribuer un épuisement de 30 p. 0/0 au seigle, de 25 p. 0/0 à l’orge et à l’avoine. Or, il résulte de là que pour donner un hectolitre sur un hectare, le froment consomme 3° 21 de fécondité, le seigle 2,34, l’orge 1,64 et l’avoine 1,18.

On a différens moyens de réparer le déficit de la fécondité, ou de l’augmenter elle-même, entre autres les engrais, le repos de la terre ou sa conversion en pâturage, et la jachère. Thaër estime qu’un chariot de fumier de 2,000 livres augmente de 2° 55 la fécondité d’un hectare ; il ne cherche pas d’ailleurs à faire exactement la part de la qualité du fumier ni celle de l’état de la terre. Il regarde au contraire cette dernière condition comme influant directement sur l’accroissement de la fécondité par le repos. Selon