Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/535

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corps ne se meurent circulairement que parce qu’ils trouvent des oppositions continuelles dans leurs mouvements directs. Ainsi tous les corps n’étant pas d’une égale grandeur, et ceux qui sont les plus grands ayant plus de force à continuer leur mouvement en ligne droite que les autres ; on conçoit facilement que les plus petits de tous les corps doivent être vers le centre du tourbillon, et les plus grands vers la circonférence, puisque les lignes que l’on conçoit être décrites pr les mouvements des corps qui sont à la circonférence approchent plus de la droite que celles que décrivent les corps qui sont proches du centre.

Si l’on pense de nouveau que chaque partie de cette matière n’a pu se mouvoir d’abord, et trouver sans cesse quelque opposition à son mouvement, sans s’arrondir et sans rompre ses angles ; on reconnaîtra facilement que toute cette étendue ne sera encore composée que de deux sortes de corps : de boules rondes qui tournent sans cesse sur leur centre en plusieurs façons différentes et qui outre leur mouvement particulier sont encore emportées par le mouvement commun du tourbillon[1] ; et d’une manière très-fluide et très-agitée, qui aura été engendrée par le froissement des houles dont on vient de parler. Outre le mouvement circulaire commun à toutes les parties du tourbillon, cette matière subtile aura encore un mouvement particulier en ligne presque droite du centre du tourbillon vers la circonférence, par les intervalles des boulœ qui leur laissent le passage libre : de sorte que leur mouvement, composé de ces mouvements, sera en ligne spirale. Cette matière fluide que M. Descartes appelle le premier élément étant divisée en des parties beaucoup plus petites, et qui ont beaucoup moins de force pour continuer leur mouvement en ligne droite que les boules, ou le second élément ; il est évident que ce premier élément doit être dans le centre du tourbillon, et dans les intervalles qui sont entre les parties du second, et que les parties du second doivent remplir le reste du tourbillon, et approcher de sa circonférence à proportion de la grosseur ou de à force qu’elles ont pour continuer leur mouvement en ligne droite. Quant à la figure de tout le tourbillon, on ne (peut douter, par les cb0S€S Qu’on vient de dire, que Véloignement’un pôle à l’autre ne soit bien lus petit que la ligne qui traverse l’équateur[2]. Et si l’on considère que les

  1. M. Descartes croit que ces petites boules sont dures par elles-mêmes ; mais ce sont plutôt de petits tourbillons d’une matière fluide. Ainsi que je le dirai dans l’Éclaîrcirsement sur la matière et les couleurs. Mon dessein n’est ici que de donner quelque idée du système de M. Descartes.
  2. Par équateur, j’entends la ligne courbe la plu grande que la matière du tourbillon décrive.