Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/599

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ceptibles de quelque fermentation par le mélange de quelque matière subtile, et que les humeurs acres et piquantes ne puissent s’insinuer dans les nerfs, on peut le supposer.

Pour résoudre la question proposée, il faut donc examiner d’abord combien il y a de sortes de mouvements convulsifs ; et, parce que le nombre en paraît indéfini, il faut s’arrêter aux principaux, dont les causes semblent être dilîérentes. Il faut considérer les parties dans lesquelles ils se font, les maladies qui les pré cet lent et qui les suivent ; s’ils se font avec douleur ou sans douleur ; et, sur toutes choses, quelle est leur promptitude et leur violence : car il y en à qui se font avec promptitude et violence, d’autres avec promptitude sans violence, et d’autres avec violence sans promptitude, et d’autres enfin sans violence et sans promptitude ; il y en a qui finissent et qui recommencent sans cesse ; il y en à qui tiennent les parties roides et sans mouvement pour quelque temps, et il y en a qui en ôtent entièrement l’usage et qui les défigurent.

Toutes ces choses considérées, il n’est pas difficile d’expliquer en général comment ces mouvements convulsifs se peuvent faire après ce qu’on vient de dire des mouvements naturels et des mouvements volontaires ; car si l’on conçoit qu’il se mêle avec les esprits qui sont contenus dans un muscle quelque matière capable de les fermenter, ce muscle s’enflera et produira dans cette partie un mouvemrnt convulsif.

Si l’on peut facilement résister à ce mouvement, ce sera une marque que les nerfs ne seront point bouchés par quelque humeur. puisque l’on peut vider le muscle des esprits qui y sont entrés et les déterminer à enfler le muscle antagoniste ; mais si l’on ne le peut, il faudra conclure que les humeurs piquantes et pénétrantes ont au moins quelque part à ce mouvement. Il peut même quelquefois arriver que ces humeurs soient la seule cause de ces mouvements convulsifs ; car elles peuvent déterminer le cours des esprits vers certains muscles, en ouvrant les passages qui les y portent et en fermant les autres, outre qu’elles peuvent en raccourcir les tendons et les fibres en pénétrant leurs pores.

Lorsqu’un poids fort pesant pend au bout d’une corde, on l’élève notablement si l’on mouille seulement cette corde, parce que les parties de l’eau, s’insinuant comme autant de petits coins entre les filets dont la corde est composée, elles l’accourcissent en l’élargissant. De même les humeurs pénétrantes et piquantes s’insinuant dans les pores des nerfs, les raccourcissent, tirent les parties qui y sont attachées, et produisent dans le corps des mouvements convulsifs qui sont extrêmement lents, violents et douloureux, et