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L’ÉCOLE CLASSIQUE

Le Sommeil aux pesants sourcils,
Enchanté d’un morne silence,
Y dort, bien loin de tous soucis,
Dans les bras de la Nonchalance,
Lâchement courbé sur le dos,
Dessus des gerbes de pavots.

 Au creux de cette grotte fraîche
Où l’Amour se pourrait geler,
Écho ne cesse de brûler
Pour son amant froid et revêche.
Je m’y coule sans faire bruit,
Et par la céleste harmonie
D’un doux luth, aux charmes instruit,
Je flatte sa triste manie,
Faisant répéter mes accords
À la voix qui lui sert de corps.

 Tantôt, sortant de ces ruines,
Je monte au haut de ce rocher,
Dont le sommet semble chercher
En quel lieu se font les bruines ;
Puis, je descends tout à loisir
Sous une falaise escarpée,
D’où je regarde avec plaisir
L’onde qui l’a presque sapée
Jusqu’au siège de Palémon,
Fait d’éponges et de limon.

 Que c’est une chose agréable,
D’être sur le bord de la mer,
Quand elle vient à se calmer
Après quelque orage effroyable,
Et que les chevelus tritons,
Hauts sur les vagues secouées,

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