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Les Fleurs du mal




Héraclès merveilleux, vers un clos d’Hespérides
Vers un clos que gardait le dragon du Réel,
Les fils de l’Idéal aux songes de pur ciel
Partirent un beau soir par les routes arides ;

Ils n’avaient pas de glaives et leurs bras rapides
Pour conquérir le beau verger aux fruits de miel
Étaient vierges du bon estoc essentiel,
Ils n’avaient pas de boucliers d’acier limpides ;

Or voici que poussaient vers eux sur le chemin
Des fleurs aux éclatants pétales de carmin,
Des fleurs comme on n’en vit jamais sur les cépées ;

Et de ces fleurs du mal avec leurs mains, ces preux
Se firent pour tuer le monstre des épées
Et des égides où riaient des reflets bleus !


Edmond Pilon