Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/57

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demeure avant tout d’Odin ; comme Zeus, l’Olympe, il l’habite avec tous les Aésir ou dieux. C’est là que parviennent les âmes des héros mourant sur le champ de bataille, guidées par les belles Valkyries, ou celles qui choisissent les corps des morts : je vois en elles, sous une forme plus haute et plus pure, les houris du paradis mahométan. Les Nornes enfin, trois sœurs, correspondent aux Fates des Latins ou Moires des Grecs : leurs noms sont Urd, Werdand et Skuld (ou Passé, Présent, Futur). Se les représenter comme des êtres doués d’une sombre et touchante beauté.

Tous, vous avez entendu parler du Crépuscule des Dieux, que célèbre aujourd’hui encore le théâtre musical allemand. Ces mots ont été employés pour désigner le temps où, comme on le supposait, le règne d’Odin et des Aésir devait toucher à sa fin. Semblable notion a-t-elle pu se faire jour, si Odin passait pour le grand Créateur de toutes choses ! Peut-être qu’inconsciemment le nom d’Odin fut employé dans plus d’un sens. Ainsi Eschyle parle de Zeus comme du dieu infini et éternel, dont le royaume ne peut avoir de fin ; mais qu’il vienne à nommer le Zeus mythique, fils de Cronos et mari d’Héré, il dit que ce Zeus détrôna son père et sera lui-même dépossédé par un descendant de Prométhée, son ami, à qui il a si gravement fait tort. Héraclès renversant Zeus répond exactement au Crépuscule des dieux norses.