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DUPLEIX AUX PRISES AVEC L’ADVERSITÉ

contrairement à l’avis de Lawrence, l’ordre de détacher une partie de ses forces contre Gingi. Le major Gingen se conforma à cet ordre, en envoyant, le 3 août, deux cents Européens, treize cents Cipayes et six cents cavaliers du nabab, sous les ordres du major Kinneer, qui venait d’arriver d’Europe.

La nouvelle de ce mouvement ayant été promptement apportée à Dupleix, il se décida à en faire usage pour porter un grand coup, et rétablir le prestige des armes de la France. Ayant donc envoyé au commandant de Gingi l’ordre de se défendre jusqu’à la dernière extrémité, il prit à même ses nouvelles levées trois cents Européens et cinq cents Cipayes, qu’il envoya avec sept pièces de campagne occuper une position à moitié route de Pondichéry à Gingi et dominant le passage que venaient de traverser les Anglais en marchant contre cette dernière ville.

Gingi était une forteresse chère à plusieurs titres aux Français ; sa prise merveilleuse par de Bussy, le 11 septembre 1750, avait placé bien haut dans l’Inde la réputation de ses compatriotes ; la victoire que M. de la Touche avait remportée à peu de distance sur les forces de Nazir-Jung, avait paru consolider et cimenter le pouvoir des Français dans le Carnate. La possession de Gingi leur donna, à elle seule, aux yeux des indigènes, un prestige difficile à efiacer. Dupleix savait bien que sa position inaccessible permettrait à une garnison bien commandée de vaincre une force quintuple de celle de Kinneer. Il savait aussi que cet officier était étranger au pays, qu’il n’en connaissait pas les populations, et qu’il était bien peu probable que, dans cette loterie du commandement, les Anglais eussent encore mis la main sur un autre Lawrence et encore moins sur un génie de l’étoffe de Clive. Son plan paraissait donc avoir des chances de succès. En attaquant les derrières de l’ennemi, qui ne pouvait réussir à rien contre Gingi, il l’inviterait à attaquer les Français dans une position choisie et fortifiée à l’avance, et alors il prendrait assurément sa revanche de Seringhara.

Il en arriva justement comme il l’avait prévu. Kinneer parut le 6 août devant Gingi, le somma de se rendre, et reçut un refus positif. Intimidé par la force de cette ville, il hésitait sur la con-