Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/66

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« Le gentilhomme le plus entiché de ses vieux pré jugés saisit avec empressement l’occasion d’y être infidèle en se rapprochant du plébéien éloquent ou de l’artiste spirituel auquel il devait de sortir de prison. »

Outre la jeune fille de la maison aux traits « angéliques », les convives sont Garat l’Idéologue, son neveu Maillat Garat, le chevalier de Panat, Benjamin Constant, Siéyès, Mme Talma. Détail typique de cette société aux éléments contradictoires : Sophie Gay est assise à table entre Chénier et le vicomte de Ségur. Étonnée, curieuse, elle regarde et elle écoute avide ment des hommes offrant de tels contrastes.

Le nom de Chénier lui fait un peu peur. Cependant le jacobin s’humanise, quitte son air dédaigneux, se fait gracieux, se vante d’un léger service rendu à Sigismond Gay : il ne s’agirait de rien moins que de lui avoir sauvé la vie, en le tirant de la Conciergerie la veille du jour où il devait comparaître devant le tribunal révolutionnaire.

D’un côté les manières aristocratiques de Chénier, de l’autre la gaîté républicaine du vicomte de Ségur : vieil ami à l’amitié coquette, car chez lui la coquetterie se mêle à tout, il n’oublie pas que sous la Terreur Sophie Gay l’a reçu en dépit de ses ailes de pigeon, de sa perruque poudrée, de sa mise aristocratique qu’il s’obstinait à ne pas quitter, et qui pouvait compromettre ses amis aussi bien que lui. Elle le voyait aussi beaucoup chez Mme de Courcelles, qui demeurait dans la même maison. Toutes deux lui prêchent inutilement la prudence : il ne peut retenir une épigramme. Quand on frappe les