Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/69

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littéraire. Elle n’est pas la seule. « Aucun siècle n’a commencé avec un aussi grand nombre de femmes de lettres », dit Fortunée Briquet au Premier Consul, en lui adressant son Dictionnaire historique des Françaises. C’est vrai. On comptait auparavant beau coup de femmes d’esprit et peu de femmes de lettres : la proportion est inversée. Mmes Desroches, Clément, Sarrazin, Lafontaine, Sommery, de Flamanville, Marie Courchamps, de Vannoz, Levesque, de Saint-Venant, Quesnard, Gacon-Dufour, Bonne, Mallarmé, Barthélemy Hadot, Chemin, de Montanclos, et cent cinquante autres également célèbres, encombrent les devantures des libraires avec des romans intitulés Méliosa, Koraïne, Ursule, Aurélie, Edmond et Henri, Isaure et Elvire, etc. Tandis que sous Louis XVI la jeune femme qui écrit est avant tout sentimentale, elle arbore sous le Directoire une belle impudeur et les principes les plus hardis. Sous le Consulat et l’Empire, elle se militarise, aime et admire la Gloire, et, ajoute malicieusement Sainte-Beuve, s’honore de la récompenser. La Restauration verra l’avènement de la femme pâle et frêle qui soupire aux Méditations et raffine sur les idées et les sentiments ; sous Louis Philippe, elle se teintera de socialisme, s’inspirera de George Sand, de Musset, d’Eugène Sue, rêvera son émancipation totale, et s’affirmera en fumant des cigarettes, voire des cigares.

Dès le Directoire, le poète Lebrun disait :

    Rassurez les Grâces confuses ;
    Ne trahissez point vos appas ;
    Voulez-vous ressembler aux Muses ?
    Inspirez, mais n’écrivez pas.