Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/80

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    Et la grâce sans ornement,
    Les hochets et la politique,
    La morale et le sentiment,
    Et les armes de la logique
    Sans l’ennui du raisonnement ;
    Je l’ai lu, je veux le relire.
Près de votre pupitre amour s’était placé :
Vous pouviez sans effort le peindre et le décrire ;
    On n’est jamais embarrassé
    Pour exprimer ce qu’on inspire ;
    Pourquoi prétendre vous cacher
    Sous le voile de l’anonyme ?
  La modestie en vain voudrait chercher
  À l’épaissir : d’accord avec l’estime,
    Le plaisir vient le détacher.
    D’ailleurs, pour rester inconnue,
  C’était trop peu de taire votre nom :
Il fallait déguiser la grâce méconnue
Qu’on prend pour la folie ou bien pour la raison,
  Tantôt coquette et tantôt ingénue,
    Qui joint le feu de l’abandon
    À l’attrait de la retenue.
    Il fallait ne pas nous charmer,
Forcer le naturel à ne jamais paraître ;
  Qui vous connaît devait vous reconnaître.
    Écrire, c’était vous nommer.
    Vous vouliez, par un goût fantasque,
Cacher votre talent ? Votre talent vous perd :
    Les traits s’éclipsent sous le masque,
    Mais l’esprit reste à découvert.
    De l’amour fidèle interprète,
    De Caylus et de Lafayette
    Suivez, suivez longtemps les pas.
    Empruntez leurs traits délicats,
Leur plume qui séduit, leur langage qu’on aime,
    Que dis-je ? Ne l’empruntez pas ;
Pour être toujours mieux, soyez toujours vous-même.