Page:Maman J. Girardin.pdf/169

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jardins et des terrains vagues. Du reste, l’e nom est au-dessus de la porte sur une enseigne.

— Le connaissez-vous ? demanda confidentiellement M. Pichon.

— Oui, je le connais, répondit l’homme Crépu d’un air défiant.

— Mais là, ce qui s’appelle connaître ? reprit M. Pichon avec insistance.

— Dites donc, vous, répondit l’homme avec un redoublement de défiance, est-ce que vous croyez que je suis payé par la police pour causer sur l’un ou sur l’autre avec le premier venu ? Vous savez où il demeure, allez lui demander à lui-même ce que vous tenez à savoir. »

M. Pichon se gratta le front à l’endroit scalpé, et regarda autour de lui en hésitant.

Le forgeron se méprit sur la cause de son hésitation et lui dit : « Vous resteriez d’ici à demain que je ne vous en dirais pas plus long.

— Ce n’est pas cela, répondit M. Pichon d’un air penaud, c’est ma malle…

— Quelle malle ? »

M. Pichon lui montra son coffre et dit :

« Je ne pourrai jamais l’emporter à moi tout seul ; voulez-vous me permettre de la laisser ici ? je viendrai la reprendre avec mon neveu. Pichon est mon neveu, fils de mon frère.

— Il fallait le dire tout de suite, s’écria le forgeron en jetant son marteau dans un coin. Alors vous êtes l’oncle de Pichon. Tout s’explique, dit-il en s’adressant à sa femme. Faites excuse, mon vieux, si l’on vous a mal reçu. Mais, voyez-vous, l’endroit est un peu désert, et il court tant de mauvaises gens qu’on se défie un peu de ceux qu’on ne connaît pas. Ah ! vous êtes l’oncle de Pichon ! Celui qui est conducteur, n’est-ce pas ?

— Il vous a parlé de moi ? demanda M. Pichon.

— Cent fois ! Il est assez fier de vous, allez. Seulement, sans reproche, vous me faites l’effet d’un drôle de pistolet. On vous attend des années, et vous ne venez pas ; on ne vous attend plus, et vous venez sans dire gare, et vous vous faites prendre pour un rôdeur. Attendez, mon vieux, la malle est trop grosse pour que je la porte tout seul, sans cela je l’aurais portée, pour vous faire oublier ce que l’on vous a dit. Mais si vous voulez me donner un coup de main,