Page:Marais - Nicole, courtisane.djvu/115

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d’une expression intense, qui transforme un instant sa figure innocente de vierge en un visage énigmatique et ambigu de Joconde adolescente.

Après l’avoir vue partir, je remonte au salon, rêveuse… Dire que j’aurais pu la connaître à l’époque où j’étais également une enfant ingénue et vibrante, cette amie de rêve dont Sylvie vient de m’offrir l’ombre ! Elle est bien jolie, la fiancée de ce jeune fourbe. Et — tranchant sur les perfidies, les combinaisons louches, le libertinage grotesque de tous ces hommes — comme le charme candide de la douce brunette aux yeux clairs me repose !… Je ne la reverrai jamais, c’est probable… c’est dommage !… Tiens, ce papier bleu, sur la table… Ah ! oui : la dépêche de tout à l’heure… Un pneu ? Non : un télégramme ; ça vient d’Allemagne. De Paul ! Je déchire, « en suivant le pointillé »… Et je lis :

« Rachel morte subitement embolie. Ramenons corps en France. Repars pour Paris lundi. — Bernard. »