Page:Marcel Schwob - Œuvres complètes. Écrits de jeunesse.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Y avait un tapis-franc qu’était peint en rouge ;
Après la lourde y avait un’ lanterne rouge…

Pourtant, y avait pas là de raill’, pas de diable,
Fleur de Marie pour voir collée sur la table —
Je fonç’ sur la fenêt’ qui donnait dans la rue,
J’me tâtais en disant : “Qu’est-ce que j’ai — je sue !”
Non, j’ai cogné sans voir la chaise en passant
Et j’ai couvert mes mains de caillots de sang.

Y avait un tapis-franc qu’était peint en rouge ;
Après la lourde y avait un’ lanterne rouge…

La fille ne criait plus guère. Elle était morte.
Ses yeux vitreux étaient retournés vers la porte
Par où les fanandels fuyaient, encor ballante…
J’entendis tout à coup passer une roulante,
Et je vis en courant abattre les rideaux…
Un œil rouge — j’en ai gardé froid dans le dos.

Et je verrai toujours, à la porte du bouge,
Vaciller devant moi cette lanterne rouge.

Ballade pour Gérard de Nerval
pendu à la fenêtre d’un bouge

Au coupe-gorge noir, sous le tombant du jorne[1]
Où tu faisais flamber ton regard andalou,
Quand tu me rouscaillais[2] ton amour en bigorne[3]
Je suis branché[4] pour toi, sinistre maritorne !

  1. jour.
  2. disais.
  3. argot.
  4. pendu.