Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/209

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ont expié leur crime au milieu des tortures.

(18) Les grands noms que je viens de citer n’ont eu pour leurs exploits d’autre mobile que la gloire : nous avons à venger, nous, le sac de nos cités, le massacre de nos armées, la destruction de nos forteresses, le désastre de nos provinces. La patrie en deuil nous crie de fermer ses plaies, de relever son honneur, et d’assurer la paix de nos provinces en portant la gloire de notre nom jusqu’à la dernière postérité.

(19) S’il plaît à l’éternelle volonté, vous me verrez à votre tête ou dans vos rangs, à cheval ou à pied, partager vos périls, et, je l’espère, vos succès. Si le sort capricieux de la guerre veut que je succombe, eh bien ! je mourrai content de m’être dévoué pour la patrie, à l’exemple des Curtius, des Scévola, et de l’illustre génération des Décius. Effaçons du rang des nations une race ennemie, dont les glaives fument encore du sang de nos concitoyens.

(20) Nos ancêtres aussi employèrent bien des années à se défaire d’adversaires trop dangereux. Que de temps, que d’efforts pour abattre Carthage ! Encore son vainqueur a-t-il craint qu’elle ne se relevât de ses ruines. Scipion ne détruisit Numance de fond en comble qu’après avoir passé par toutes les vicissitudes d’un long siège. Rome renversa Fidènes, pour n’avoir point de rivale : elle écrasa les Véiens et les Falisques. Si bien qu’il faut l’attestation de nos annales pour croire qu’autant de cités puissantes aient existé sous chacun de ces noms.

(21) Voilà quelles leçons le passé nous offre. Une recommandation me reste à vous faire. Trop souvent l’ardeur du pillage fut la perte du soldat romain. Mettez-vous au-dessus d’un entraînement si peu digne de vous. Que nul ne quitte son bataillon, afin que tous, si l’on en vient aux mains, soient prêts à combattre sous le drapeau. Sachez-le bien ; il y va pour les traîneurs d’avoir les jarrets coupés, et de périr sans secours possible ; car nos ennemis sont rusés, et je ne crains d’eux que leurs surprises.

(22) Le succès de cette expédition donnera la paix à l’empire. Alors, je le promets, déposant la prérogative, et renonçant à l’irresponsabilité du pouvoir, je me tiendrai comptable envers chacun du bien opéré comme des fautes.

(23) Courage, mes amis, courage ! Espérez le mieux, mais acceptez avec moi une communauté d’efforts et de périls, forts de cette conviction, qu’au bon droit reste toujours la victoire."

(24) La conclusion était heureuse. Transportés à la fois d’enthousiasme pour leur chef, de ferveur guerrière et d’espoir, les soldats, d’un même mouvement, élèvent en l’air leurs boucliers, et s’écrient que ni périls ni travaux ne les étonnent avec un général qui en prend une part plus forte que le dernier des soldats.

(25) L’exaltation était surtout extrême parmi les légions gauloises, chez qui était encore présent le souvenir de Julien marchant à leur tête ou parcourant leurs lignes, et qui sous ses ordres n’avaient abordé l’ennemi que pour l’anéantir ou l’entendre crier merci.

Chapitre VI

(1) Ici l’intelligence du récit exige encore une digression. Je vais donner une notice abrégée de la Perse, sujet qui a particulièrement occupé les géographes, mais où très peu d’entre eux ont