Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/262

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d’avoir livré son fils, à peine adolescent, à un magicien, pour l’instruire dans la science occulte et prohibée par les lois ; voulant par là s’assurer des moyens de réussite dont nul compétiteur n’aurait le secret. Mal surveillé par le bourreau, le coupable s’échappa, et courut se réfugier dans un temple chrétien. Mais il fut arraché du sanctuaire et décapité.

(4) Cette rigueur dans la répression fit du moins que les délinquants s’observèrent, et n’osèrent plus, ou n’osèrent que rarement, braver la vindicte publique. Mais le régime d’impunité qui reparut avec l’administration suivante ramena et nourrit le désordre. La licence alla jusqu’à ce point, qu’un sénateur qui désirait pour son esclave le même enseignement illicite qu’Hilarin avait fait donner à son fils, traita, dit-on, dans toutes les formes, sauf l’engagement écrit, avec un professeur de cette science perverse, et, convaincu du fait, se racheta de la condamnation par le payement d’une grosse somme.

(5) Le même sénateur aujourd’hui, loin de rougir de cette double infamie et de s’efforcer d’en faire oublier la honte, foule superbement à cheval le pavé des rues, de l’air d’un homme qui croit qu’il n’y a que lui qui puisse aller tête levée ; affecte de se donner en spectacle, traînant à sa suite une cohue de valets ; parodiant ainsi cet illustre Duillius qui eut le privilège, en récompense de ses victoires navales, de se faire précéder d’un joueur de flûte, lorsqu’il rentrait le soir chez lui après avoir soupé en ville.

(6) Sous Apronien, du reste, on vit régner à Rome l’abondance de toutes choses nécessaires à la vie. Il n’y eut pas un murmure sur la rareté d’une denrée quelconque.

Chapitre IV

(1) Valentinien, proclamé, comme je viens de le dire, empereur en Bithynie, donna pour le surlendemain l’ordre du départ. Mais auparavant il convoqua les hauts personnages de l’État, et, avec une feinte déférence, les consulta, comme si leur vœu devait dicter son choix, sur la désignation du collègue qu’il devait se donner. Dagalaif, maître de la cavalerie, dit en cette occasion, avec une noble hardiesse : "Prince, si vous obéissez au sentiment de famille, vous avez un frère ; votre collègue est tout trouvé. Si c’est le patriotisme qui vous guide, cherchez le plus digne."

(2) L’empereur fut blessé au vif ; mais, dissimulant cette impression, il se rendit en toute hâte à Nicomédie, où il conféra la charge de grand écuyer avec le tribunat à son frère Valens.

(3) Il gagna ensuite Constantinople, roulant mille pensées dans sa tête. Là, se supposant déjà débordé par le torrent des affaires, pour en finir, le 5 des calendes d’avril, il donna dans l’Hebdomon, du consentement général (car nulle opposition n’osa se manifester), le titre d’Auguste à Valens ; et, après l’avoir revêtu des vêtements impériaux et ceint du diadème, il ramena dans son propre char cet ostensible associé de son pouvoir, qui n’était en réalité, comme on le verra par la suite, que l’instrument passif de ses volontés.

(4) Tout cela s’était accompli sans obstacle, quand les deux empereurs furent à la fois saisis d’un accès de fièvre. Le danger dura peu. Mais plus