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LIVRE XV.

SOMMAIRE DES CHAPITRES.

I. On annonce à l’empereur la mort du César Gallus. II. Ursicin, général de la cavalerie en Orient, Julien, frère de Gallus, et le chambellan Gorgonius, accusés du crime de lèse-majesté. III. Rigueurs exercées contre les amis et serviteurs de Gallus. IV. Constance taille en pièces ou met en fuite les Allemands Lentiens[1]. V. Sylvain, Franc de naissance, et général de l’infanterie dans les Gaules, est salué empereur à Cologne. Il tombe dans un piége, et périt après vingt-huit jours de règne. VI. Les amis et complices de Sylvain sont mis à mort. VII. Séditions réprimées à Rome par le préfet Léonce. L’évêque Libère est enlevé de son siége. VIII. Constance donne le titre de César à Julien, frère de Gallus, et lui confie l’administration des Gaules. IX. Origine des Gaulois. Étymologie des noms de Celtes et de Galates. Corporations savantes chez ces peuples. X. Alpes Gauloises. Communications ouvertes au travers de ces montagnes. XI. Divisions du territoire, et description sommaire des Gaules et du cours du Rhône. XII. Mœurs des Gaulois. XIII. Musonien préfet du prétoire en Orient.

(An 354 ap. J. C.)

Le livre qui précède, fidèle, autant qu’il a dépendu de moi, aux lois de la vérité, résume par ordre ce que j’ai

I. A peine avait-on arraché à Gallus le vêtement royal en Norique, qu’Apodème, le plus ardent des promoteurs de la discorde tant que ce prince avait vécu, s’empare de sa chaussure, et, avec une précipitation qui lui fit crever plusieurs chevaux, malgré la fréquence des relais disposés sur sa route, pousse droit à Milan, jaloux de l’honneur d’annoncer le premier la nouvelle. A peine arrivé, il court au palais, et jette cette dépouille aux pieds de Constance, du même air qu’il eût fait un trophée conquis sur le roi des Parthes. L’annonce eut bientôt circulé. En apprenant avec quelle promptitude s’est accompli, comme à souhait, ce coup d’État si hasardeux, les courtisans d’épuiser à l’envi toutes les formules adulatrices, et de porter jusqu’aux nues le courage et le bonheur d’un prince qui par deux fois, à des époques différentes, avait d’un signe abaissé deux puissances telles que Vétéranion et Gallus, aussi aisément qu’on licencierait deux recrues. Enivré du parfum de ces flatteries, Constance en vint à se croire de bonne foi au-dessus de la condition humaine. On le vit s’oublier jusqu’à se conférer à lui-même l’éternité dans les lettres qu’il dictait, et jusqu’à s’intituler le maître de la terre, dans celles qu’il écrivait de sa main. Et cependant n’eût-il pas dû s’offenser plutôt d’être ainsi qualifié par d’autres, lui qui mettait tant

  1. Habitants de Lintz.