Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/701

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dre avec les armes ? Il y a mille occasions qui augmentent la disette : dans un siège, par exemple, l’assiégeant le fera durer plus longtemps que vous ne pensez, quoiqu’il manque de vivres, dans l’espérance de vous réduire vous-même à un plus grand besoin. En conséquence, il faut donner ordre, et au besoin exiger, par des agents de réquisition, que tout ce qui pourrait être pris par l’ennemi, en bétail, blé et vins, soit transporté par les habitants dans des forts situés à portée, et munis de bonnes garnisons ; on doit aussi obliger les habitants eux-mêmes de s’y retirer avant l’invasion, eux et leurs effets. Il ne faut pas attendre le moment du siège pour mettre les murs et les machines de guerre en état de défense, car si l’ennemi vous surprend dans ce travail, la crainte y jettera le désordre ; d’ailleurs la communication étant interrompue entre la ville assiégée et les villes voisines, elle n’en pourra rien tirer de ce qui lui serait nécessaire. Au reste, on pourvoit à la subsistance des garnisons avec des provisions médiocres, en commettant des gens fidèles à la garde des magasins, et en distribuant les vivres avec économie dès le commencement du siège. C’est une épargne tardive, que de commencer à ménager les vivres quand ils manquent. Voilà pourquoi, dans les expéditions difficiles, les anciens distribuaient des vivres par tête, et non d’après le grade ; et la nécessité venant à cesser, la république tenait compte à chacun des rations qu’il n’avait pas reçues. On doit faire en sorte qu’il y ait suffisamment en hiver du bois et du fourrage ; en été, de l’eau ; en tout temps, du blé, du vin, du vinaigre, du sel ; que les places de guerre et les forts soient bien munis de flèches, de pierres, de balistes, de catapultes, et de diverses sortes de frondes, afin que les soldats qu’on juge moins propres à la guerre de campagne, et qu’on emploie, par cette raison, à la garde des places trouvent de quoi les défendre ; que ceux qui habitent une ville ou les environs ne se laissent point amuser par les ruses et les serments de l’ennemi, plus dangereux sous des apparences de négociations et de paix, qu’à force ouverte. De cette sorte, les assiégés peuvent affamer l’ennemi, s’il tient ses forces ensemble, et battre facilement en détail par des sorties, s’il les sépare.

chapitre iv.
De la conduite qu’il faut tenir pour éviter les séditions.

Souvent, dans une armée qui vient de s’assembler de différentes provinces, il s’élève des mouvements de sédition ; et des troupes murmurent hautement de ce qu’on ne les mène pas combattre, quoiqu’en effet elles n’en aient pas envie : ce qui arrive principalement à ceux qui dans leurs quartiers ont vécu dans l’oisiveté et dans la mollesse ; car le travail qu’il faut soutenir dans le cours d’une campagne, et dont ils ont perdu l’habitude, les rebute ; et comme ils craignent nécessairement les combats, puisqu’ils craignent même l’exercice, ils ne les demandent que par une présomption mal soutenue. A ce mal on applique plus d’un remède. Pendant que les corps sont chacun dans leurs quartiers, et séparés les uns des autres, il faut que les tribuns, leurs lieutenants et officiers tiennent leurs soldats dans une discipline sévère ; qu’ils ne respirent que le devoir et la soumission ; qu’on les fasse sans relâche