Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/715

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s’ils sont repoussés, ils se replient sur la première et la seconde ligne, et regagnent leur poste par les intervalles de ces deux lignes, lesquelles soutiennent tout le choc, dès qu’on en est venu à l’épée et aux javelots. On a formé quelquefois un cinquième rang de machines propres à lancer des pierres ou des javelots, et de soldats destinés à servir ces machines, ou à lancer eux-mêmes différentes armes de trait. Ceux qu’on appelle fustibulatores se servaient d’un bâton (fustibalus) de quatre pieds de long, au milieu duquel on attachait une fronde de cuir, qui, recevant des deux mains une impulsion violente, lançait des pierres presque aussi loin que la catapulte. Les frondeurs proprement dits sont ceux qui portent des frondes de lin ou de crin, matières très propres à cet usage : en faisant un certain tour de bras autour de la tête, ils lancent les pierres fort loin. Les jeunes soldats, qui, n’étant pas encore incorporés à la légion, ne portent pas autrefois de boucliers, combattaient ce cinquième rang, soit en jetant des pierres avec la main, soit en lançant le javelot : on les appela d’abord accensi, et dans la suite additi. Enfin, le sixième rang était composé de soldats bien éprouvés, couverts de boucliers, et pourvus toutes sortes d’armes, tant offensives que défensives ; on les appelait triarii : ils avaient coutume de se tenir sur les derrières de l’armée, afin de tomber sur l’ennemi avec des forces fraîches entières ; car s’il arrivait quelque échec aux premières lignes, c’est sur les triaires que reposait tout l’espoir de les réparer.

chapitre xv.
De l’espace qui doit exister en longueur entre les hommes du même rang, en largeur entre les rangs.

Après avoir expliqué l’ordonnance d’une armée en bataille, voyons quel espace il faut pour l’y ranger. Dans l’étendue de mille pas de terrain, un rang doit contenir mille six cent soixante-six fantassins, parce que chaque homme occupe trois pieds de front : que si dans mille pas de terrain on veut former six rangs, il faut avoir neuf mille neuf cent quatre-vingt-seize hommes ; et si de ce même nombre on ne veut faire que trois rangs, il faudra occuper deux mille pas de terrain ; mais il vaut mieux augmenter le nombre des rangs, que d’étendre trop le front de sa bataille. Il faut laisser entre chaque rang un espace de sept pieds, y compris un pied qu’occupe chaque soldat dans son rang : ainsi, en rangeant une armée de dix mille hommes sur six de hauteur, elle occupera quatre mille neuf cent quatre-vingt-dix-huit pieds de long sur quarante-deux de large ; si vous ne lui en donnez que trois de hauteur, elle occupera neuf mille neuf cent quatre-vingt-seize pieds de long sur vingt et un de large. Vous pourrez aisément, sur cette proportion, ranger en bataille vingt ou trente mille hommes d’infanterie ; et vous n’y serez jamais trompé, pourvu que vous ayez la précaution de reconnaître d’avance votre champ de bataille, et de savoir combien d’hommes il peut contenir. Si votre terrain est trop étroit par rapport au nombre de vos troupes, vous pouvez vous ranger