Page:Marcellin, Jornandès, Frontin, Végèce, Modestus - Traductions de Nisard, 1860.djvu/742

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chapitre xi.
Pronostics du beau temps et du mauvais temps.

La lune est une espèce de miroir, où l’on peut voir plusieurs signes de tempêtes ou de beau temps. La couleur rouge dénote les vents ; la bleuâtre, la pluie ; et mêlées ensemble elles annoncent de grosses pluies et des tempêtes furieuses. La lune belle et brillante promet aux vaisseaux la sérénité qu’elle porte sur son disque, surtout si à son quatrième jour les cornes de croissant ne sont point émoussées, ni son disque rougeâtre, ou offusqué par des vapeurs. On remarque aussi les levers et les couchers du soleil. Qu’il éclaire également l’horizon, ou que des nuages le dérobent de temps en temps ; qu’il soit brillant, ou que sous le souffle des vents il ressemble à un incendie ; qu’il soit pâle et taché par la pluie menaçante, ce sont autant de pronostics connus. L’air, la mer même, la grandeur ou la couleur des nuées, instruisent les matelots attentifs de ce qu’ils en doivent attendre. Les oiseaux et les poissons leur donnent aussi quelques signes. Le divin génie de Virgile les a rassemblés dans ses Géorgiques, et Varron les a bien décrits dans ses livres De la navigation. Les pilotes font profession de savoir toutes ces choses ; mais l’usage et une habitude grossière ont plus de part à leurs connaissances que les observations réfléchies.

chapitre xii.
Du flux et du reflux.

La mer est le troisième élément du monde. Outre le souffle des vents qui l’agite, elle est animée par un mouvement et une respiration propre. A certaines heures du jour et de la nuit, elle va et vient par une certaine agitation qu’on appelle flux et reflux. Tantôt, comme un torrent, elle déborde vers les terres, et tantôt elle refoule ses eaux vers leur lit. Ce mouvement réciproque aide ou retarde les navires, selon qu’il est favorable ou contraire ; et c’est sur quoi il est important de bien prendre ses mesures quand on veut donner un combat. La violence de la marée ne peut se vaincre par la force des rames, puisque le vent même lui cède ; et comme elle varie selon la diversité des côtes et les phases de la lune, il faut, avant que d’engager un combat naval, connaître les heures de la marée pour les côtes où l’on se trouve actuellement.

chapitre xiii.
De la connaissance des lieux, ou de la manœuvre.

L’habileté des pilotes consiste à bien connaître les mers où l’on navigue, afin d’éviter les rochers, les vigies, les bancs de sable, les bas-fonds et autres écueils. Plus la mer est profonde, plus on est en sûreté. Si l’on demande de la vigilance dans le capitaine et du savoir dans le pilote, il faut de la force dans les rameurs, parce que les batailles navales se donnent en temps calme, où il n’est plus question du souffle des vents pour faire agir des masses comme les liburnes. Elles ont besoin de toute la force des rames pour choquer violemment de leurs éperons les vaisseaux ennemis, et pour en éviter le choc à leur tour. Dans ces manœuvres, c’est du bras des rameurs et de l’adresse du timonier qui