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Regis prodeunt, etc., de quoi les sarrasins étaient aussi étonnés que peu satisfaits.


XXXIX


Description des pays qui sont aux environs de la cour du Khan ; des mœurs, monnaies et écriture.


Depuis que nous fûmes arrivés à la cour de Mangu-Khan, il n’alla que deux fois vers les parties du midi, et après il commença de retourner au septentrion, à savoir vers Caracorum. Je pris bien garde à tout ce chemin, remarquant entre autres choses ce dont m’avait autrefois parlé, étant à Constantinople, M. Baudouin de Hainaut, qui y avait été : c’est qu’en allant en ce pays-là, on montait presque toujours sans jamais descendre. Toutes les rivières vont de l’orient à l’occident, ou directement ou indirectement, c’est-à-dire tournant un peu vers le midi ou le septentrion. Je m’enquis de cela aux prêtres qui venaient du Cathay, qui me témoignaient la même chose. De ce lieu où je trouvai Mangu-Khan jusqu’au Cathay, il pouvait y avoir la distance de vingt journées en allant entre le midi et l’orient ; et jusqu’à Mancherules (ou Onancherule), qui est le propre et vrai pays de Moal, où était la cour de Cingis, il y a environ dix journées droit à l’orient. En ces quartiers d’orient on ne trouve aucune ville, mais seulement quelques habitations de peuples surnommés Su-Moal, c’est-à-dire Moals des eaux, car « su » signifie eau en tartare. Ces gens-là ne vivent que de poisson et de chasse et n’ont point de bestiaux.

Vers le nord il y a d’autres pays qui sont aussi sans villes et cités, où n’habitent que de pauvres gens qui nourrissent des troupeaux et se nomment Kerkin. Il y a aussi les Orangey ou Orengay, qui portent de petits os bien polis attachés aux pieds ; et avec cela ils courent si vite sur la glace et la neige qu’ils prennent les bêtes à la course, et les oiseaux mêmes. Il y a encore plusieurs autres pauvres peuples du côté du nord, qui