Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/134

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attachée au col de la femme qui avait tué la fille, puis qu’elle fût fouettée et battue par tous les carrefours avec des tisons de feu, et après mise aussi à mort. Il eût fait faire aussi la même exécution sur sa propre femme sans la considération des enfants qu’il avait eus d’elle ; mais il la fit sortir de la cour, où elle ne retourna que plusieurs mois après.

Mais, pour revenir à ces devins et sorciers, ils prétendent savoir, quand il leur plaît, troubler l’air avec leurs charmes ; et comme le froid est extrêmement violent vers le temps de Noël, quand ils voient qu’ils n’y peuvent apporter de remède avec tous leurs sorts, ils s’avisent d’accuser quelques-uns de la suite de la cour, comme étant cause de ces excessives froidures ; et ceux-là sont mis à mort sur-le-champ.

Peu de jours avant que je partisse de là, une des femmes du Khan devint fort malade et était en une grande langueur ; si bien que les devins, y étant appelés, murmurèrent quelques paroles de sort sur une certaine esclave allemande qu’elle avait. Cette esclave fut endormie l’espace de trois jours entiers, au bout desquels s’étant réveillée, ils lui demandèrent ce qu’elle avait vu durant son dormir ; elle répondit qu’elle avait vu plusieurs sortes de personnes, qu’ils jugèrent devoir mourir bientôt ; et comme elle dit n’avoir pas vu sa maîtresse parmi ces gens-là, ils prononcèrent hardiment qu’elle ne mourrait pas de cette maladie. Je vis depuis cette fille, qui se sentait encore fort mal à la tête de ce long sommeil.

Quelques-uns d’entre eux se mêlent aussi d’invoquer les diables, pour apprendre d’eux ce qu’ils désirent savoir. Quand ils veulent avoir réponse pour quelque chose que le Khan leur demande, ils mettent la nuit au milieu de la maison des pièces de chair bouillie ; puis celui qui fait l’invocation commence à murmurer ses charmes, et tenant un tambourin en la main, le frappe fort contre terre et se démène, en sorte qu’il devient comme hors de soi et commence à rêver ; après quoi il se fait lier bien serré ; alors le diable vient