Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/202

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daims, chevreaux, et des faucons, que l’on entretient pour le plaisir et pour la table du roi, lorsqu’il vient dans la ville. Car il y vient souvent pour prendre le divertissement de la chasse ; il monte à cheval et mène avec lui un léopard apprivoisé, qu’il lance sur les daims, et qui, après avoir pris la bête, la porte aux gerfauts, à quoi le roi trouve un fort grand plaisir. Au milieu de ce parc il y a une maison bâtie avec des roseaux très magnifiques, étant dorée dehors et dedans et remplie de belles peintures ; elle est bâtie avec tant d’industrie que la pluie n’y peut faire aucun dommage. Cette maison se peut porter partout comme une tente, car l’on soutient qu’elle est attachée avec deux cents cordes de soie ; les roseaux dont elle est construite ont quinze pas de longueur et trois paumes d’épaisseur ; tout en est fait : les colonnes, les tables. Les assemblages et les couvertures. Ces roseaux sont rompus à l’endroit des nœuds, et chaque partie fendue donne comme deux petites gouttières, par lesquelles la pluie s’écoule, ne causant aucun dommage. Le Grand Khan demeure là ordinairement pendant trois mois de l’année, à savoir juin, juillet et août ; car cet endroit a un air fort sain, n’étant point exposé aux ardeurs du soleil. Pendant ces trois mois la maison demeure sur pied, et le reste du temps elle est pliée et serrée. Le roi part de la ville de Ciandu le 28 d’août, et va à un autre endroit pour faire un sacrifice solennel à ses dieux, et leur demander la continuation de la vie et de la santé, pour lui, pour ses femmes, ses enfants et ses bestiaux. Car il a une grande quantité de chevaux blancs et de cavales blanches. On en fait monter le nombre jusqu’à dix mille et plus. Or pendant cette fête on prépare du lait de cavale, dans de beaux vases ; et le roi, de ses propres mains, le verse par terre çà et là, s’imaginant, instruit à cela par ses magiciens, que les dieux boivent ce lait répandu, et que cela les engage à prendre soin de tous ses biens. Après ce sacrifice le roi boit lui-même de ce lait de cavales blanches, et il n’est permis à personne d’en boire ce