Page:Margueritte - À la mer, 1906.djvu/24

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plus marquée, moins d’intimité que celui de cousine. Il ne bougeait pas de sa place, d’ailleurs paralysé par un accès de timidité, craignant, s’il descendait, qu’on ne lui prît cette place, où il était bien, serré contre « sa tante », dont il sentait les hanches, à travers une élégante jupe de lainage bleu-marin, à broderies russes. Gabrielle posa une main gantée de Suède sur sa main de collégien, pas très blanche, et que la descente de wagon avait salie :

— Mais comme tu as grandi, mon petit Albert, te voilà un homme à présent !

Elle partit d’un éclat de rire :

— Thérésine, tu sais, dit-elle à Mme Janville, Albert sera ma passion ! Nous nous amuserons ensemble, demain il y a une pêche à la crevette. Albert sera mon cavalier ! C’est qu’il a presque de la barbe !

L’adolescent rougit de plaisir et de confusion. Ce n’est donc pas pour rien qu’il se rasait les joues et s’estafilait le menton ; le problématique duvet de ses lèvres, foncé, par un sournois cosmétique, apparaissait enfin, comme une ligne d’ombre douteuse, sous son nez. Gabrielle l’avait vu, c’était un fait désormais avéré ; et il sut gré