Page:Mariel - Pierre Loti, 1909.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 7 —

s’initie aux charmes de la vraie nature dans les bois de chênes de « La Limoise ».

Le premier événement qui fasse époque dans son existence, c’est le départ du frère aîné pour la campagne du Pacifique. Et Loti suit par la pensée l’absent vers les îles lointaines qu’il tâche d’évoquer en s’aidant de ce qu’un gros livre à images a pu lui apprendre sur l’Océanie. Pourtant à cette époque, l’enfant ne songe pas encore à se faire marin. Choyé par tous les siens, il porte à ceux-ci, à sa mère en premier lieu, un culte que les ans n’affaibliront point et qui l’empêche encore de songer à quitter pour toujours sa maison familiale. Sa sensibilité cependant s’exalte dans ce milieu de serre chaude. La religion exerce sur lui une influence capitale et séduit par le côté grandiose de la poésie biblique, il rêve d’être un jour pasteur. Mais en même temps le côté sévère de la religion trouble ses joies d’enfant, et sa conscience est si timorée que la crainte du péché suffit à assombrir ses journées. Après avoir songé à le mettre en pension, ses parents lui font donner des maîtres. Mais le travail imposé lui est odieux.

Les livres et les cahiers lui apparaissent désespérément maussade. Ses joies sont alors la musique, déjà sentie avec intensité, ses collections de papillons ou de coquillages et le cabinet d’histoire naturelle d’un grand oncle médecin qui lui parle du Sénégal et de la Guinée et lui prédit qu’il sera un savant naturaliste. Pour Loti, pourtant, tous ces échantillons des flores ou des faunes lointaines ne