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éternité s’est mêlée à la douce splendeur des caresses, à la molle langueur des tendresses

… Il est des livres qui nous charment parce qu’ils sont le reflet de nos idées et de nos tristesses. Nous retrouvons en eux des infinies lassitudes de notre rêve, et nous les affectionnons pour l’extériorité qu’ils donnèrent à nos sentiments intérieurs. Les romans de Pierre Loti sont de ceux-là. Peut-être leur grâce est-elle souvent trop sensuelle et trop voluptueuse, au gré de la pensée chercheuse d’idéalité plutôt que de sensations : mais ils témoignent précisément de l’immense mélancolie qui se cache au fond de toute volupté ; et de l’amour physique, étrangement troublant, ils dégagent l’amour immatériel éternellement indéfinissable et pleurant éternellement au fond des poitrines humaines.

Âmes Modernes (1895).

De M. Anatole France.

Il était réservé à Pierre Loti de nous faire goûter jusqu’à l’ivresse, jusqu’au délire, jusqu’à la stupeur l’âcre saveur des amours exotiques.

Il est heureux pour lui et pour nous que M. Pierre Loti soit entré dans la marine et qu’il ait beaucoup voyagé ; car la nature lui avait donné une âme avide et légère à laquelle il fallait beaucoup d’images. Elle lui avait donné, de plus, des sens exquis pour goûter la beauté de l’amoureux univers, une intelligence naïve et libre, et cette rare faculté de l’artiste qui se voit, s’écoute, s’observe, cristallise ses souvenirs. Il était comme fait exprès pour nous apporter la beauté