Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 3.djvu/372

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la justice que je dois vous rendre ? Me reconnaissez-vous ? Ne sont-ce pas là les faiblesses d’un enfant que je rapporte ?

HORTENSE

Oui ; mais les faiblesses d’un enfant de votre âge sont dangereuses, et je voudrais bien n’avoir rien à démêler avec elles.

LA PRINCESSE

Écoutez ; je n’ai pas tant de tort ; tantôt pendant que nous étions à cette fête, Lélio n’a presque regardé que vous, vous le savez bien.

HORTENSE

Moi, Madame ?

LA PRINCESSE

Hé bien, vous n’en convenez pas ; cela est mal entendu, par exemple ; il semblerait qu’il y a du mystère ; n’ai-je pas remarqué que les regards de Lélio vous embarrassaient, et que vous n’osiez pas le regarder, par considération pour moi sans doute ?… Vous ne me répondez pas ?

HORTENSE

C’est que je vous vois en train de remarquer, et si je réponds, j’ai peur que vous ne remarquiez encore quelque chose dans ma réponse ; cependant je n’y gagne rien, car vous faites une remarque sur mon silence. Je ne sais plus comment me conduire ; si je me tais, c’est du mystère ; si je parle, autre mystère ; enfin je suis mystère depuis les pieds jusqu’à la tête. En vérité, je n’ose pas me remuer ; j’ai peur que vous