Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/144

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chez M. Villot, tant pour me remercier du silence que j’avais gardé sur son aventure, que pour me conjurer d’avoir toujours cette charité-là pour lui (c’était ainsi qu’il appelait ma discrétion), et pour m’assurer qu’il ne songeait plus à la religieuse ; en quoi il ne me trompait pas. Il venait même me trouver quelquefois dans une grande allée qui était près de notre maison, où j’avais coutume de me promener en lisant. On nous y avait vus plusieurs fois ensemble ; on savait qu’il venait de temps en temps au logis, et cela ne tirait à aucune conséquence ; au contraire, on ne m’en estimait que davantage, on le croyait presque un saint.

Il y avait alors quelque temps que je ne l’avais vu, et il vint le surlendemain du jour où tout ce que je viens de vous dire avait été arrêté chez Mme de Sainte-Hermières.

J’étais dans notre jardin quand il arriva ; et sur la connaissance que j’avais du caractère de l’abbé, aussi bien que de la corruption de ses mœurs, qui devait lui faire souhaiter d’être riche, je pensais au chagrin que lui ferait mon mariage avec son oncle, quand on le déclarerait. Mais il le savait déjà.

Il fallait bien que Mme de Sainte-Hermières eût été indiscrète, et qu’elle eût confié l’affaire à quelque bonne amie, qui en eût à son tour fait confidence à quelqu’un qui l’eût dit à l’abbé.

Bonjour, mademoiselle, me dit-il en m’abordant ; j’apprends que vous allez épouser le baron de Sercour, et je viens d’avance assurer ma tante de mes respects.