Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/234

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sera temps d’y songer dans quelques années. Comme il vous plaira, répondit Mme Dorfrainville, qui ne daigna pas lui en dire davantage, et qui se sépara d’elle avec une froideur dont Mme Dursan profita pour avoir un prétexte de ne la plus voir, et pour se délivrer de ses reproches.

Cette femme, que nous avions mal connue, ne s’en tint pas à éloigner le mariage en question. Je sus qu’elle faisait consulter d’habiles gens, pour savoir si on ne pourrait pas attaquer le dernier écrit de ma tante ; et ce fut encore Mme Dorfrainville qu’on instruisit de cette autre indignité, et qui me l’apprit.

Dursan, qui la savait, et qui n’osa me la dire, était au désespoir. Ce n’était pas de lui dont j’avais à me plaindre alors, il m’aimait au delà de toute expression : je ne lui dissimulais pas que je l’aimais aussi ; et plus Mme Dursan en usait mal avec moi, plus son fils, que je croyais si différent d’elle, me devenait cher : mon cœur le récompensait par là de ce qu’il ne ressemblait pas à sa mère.

Mais cette mère, tout ingrate qu’elle était, avait un ascendant prodigieux sur lui ; il n’osait lui parler avec autant de force qu’il l’aurait dû ; il n’en avait pas le courage. Pour le faire taire, elle n’avait qu’à lui dire : Vous me chagrinez ; et c’en était fait, il n’allait pas plus loin.

Les mauvaises intentions de cette mère ne se terminèrent pas à me disputer, s’il était possible, le tiers du bien qui m’appartenait ; elle résolut encore de m’écarter de chez elle, dans l’espérance que son fils,