Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/285

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droits en faveur de son fils, et de se contenter d’une pension assez modique qu’il était convenu de lui faire, à laquelle elle se borna d’autant plus volontiers qu’il s’engageait à la prendre chez lui et à la défrayer de tout.

Elle se retira donc chez ce fils deux jours après la mort de son mari ; on l’y reçut d’abord avec politesse. Le premier mois s’y passe sans qu’elle ait à se plaindre des façons qu’on a pour elle, mais aussi sans qu’elle ait à s’en louer : c’était de ces procédés froids, quoique honnêtes, dont le cœur ne saurait être content, mais dont on ne pourrait ni faire sentir ni expliquer le défaut aux autres.

Après ce premier mois, son fils insensiblement la négligea plus qu’à l’ordinaire. Sa belle-fille, qui était naturellement fière et dédaigneuse, qui avait vu par hasard quelques nobles du pays venir en assez mauvais ordre rendre visite à sa belle-mère, qui la croyait elle-même fort au-dessous de l’honneur que feu le marquis lui avait fait de l’épouser, redoubla de froideur pour elle, supprima de jour en jour de certains égards qu’elle avait eus jusqu’alors, et se relâcha si fort sur les attentions, qu’elle en devint choquante.

Aussi ma mère, qui de son côté avait de la hauteur, en fut-elle extrêmement offensée, et lui en marqua un jour son ressentiment.

Je vous dispense, lui dit-elle, du respect que vous me devez comme à votre belle-mère ; manquez-y tant qu’il vous plaira, c’est plus votre affaire que la mienne, et je laisse au public à me venger là-dessus ;