Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/32

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ah çà ! voyons ! vous m’avez conté votre histoire, ma chère Marianne ; mais il y a bien de petits articles que vous ne m’avez dits qu’en passant, et qui sont extrêmement importants, qui ont pu. vous nuire. Valville, qui vous aimait, ne s’y est point arrêté, il ne s’en est point soucié ; et il a bien fait. Mais votre histoire a éclaté ; ces petits articles ont été sus de tout le monde, et tout le monde n’est pas Valville, n’est pas Mme de Miran ; les gens qui pensent bien sont rares. Cette marchande de linge chez qui vous avez été en boutique ; ce bon religieux qui a été vous chercher du secours chez un parent de Valville ; ce couvent où vous avez été vous présenter pour être reçue par charité ; cette aventure de la marchande qui vous reconnut chez une dame appelée Mme de Fare ; votre enlèvement d’ici, votre apparition chez le ministre en si grande compagnie ; ce petit commis qu’on vous destinait à la place de Valville, et cent autres choses qui font, à la vérité, qu’on loue votre caractère, qui prouvent qu’il n’y a point de fille plus estimable que vous, mais qui sont humiliantes, qui vous rabaissent, quoique injustement, et qu’il est cruel qu’on sache à cause de la vanité qu’on a dans le monde : tout cela, dis-je, dont Valville m’a rendu compte, lui a été représenté. Vous ne sauriez croire tout ce qu’on lui a dit là-dessus, ni combien on condamne sa mère, combien on persécute ce jeune homme sur le dessein qu’il a de vous épouser. Ce sont des amis qui rompent avec lui, ce sont des parents qui ne veulent plus le voir, s’il ne renonce pas à son projet ; il n’y a pas jusqu’aux indifférents qui ne le