Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/462

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d’embarras pour moi ; mais Dieu m’inspire de le prendre ; et je vous conjure, en son nom, de vous laisser conduire. Me le promettez-vous ?

Pour moi, monsieur, dit l’aînée avec un entier abandon à ses volontés, je vous réponds que vous êtes le maître, et vous verrez quelle est ma soumission ; car dès cet instant, je m’engage à n’exiger aucun service du jeune homme en question, et je ne doute pas que ma sœur ne m’imite.

En vérité, reprit la cadette avec un visage presque allumé de colère, je ne sais comment prendre tout ce que j’entends. Voilà déjà ma sœur liguée contre moi ; la voilà charmée du tort imaginaire qu’on me donne, et ce n’est pas d’aujourd’hui qu’elle est de cette façon-là à mon égard, puisqu’il faut le dire, et que la manière dont on me parle m’y force ; elle ne doute pas, dit-elle, que je ne me conforme à sa conduite, eh ! je n’ai jamais fait autre chose depuis que nous vivons ensemble ; il a toujours fallu plier sous elle pour avoir la paix : Dieu sait, sans reproche, combien de fois je lui ai sacrifié ma volonté, qui n’avait pourtant point d’autre défaut que de n’être pas la sienne ; et franchement, je commence à me lasser de cette sujétion que je ne lui dois point. Oui,