Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/470

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pour avoir leur bourse : voilà ce qui vous en semble.

Eh ! qui est-ce qui vous dit cela, mon enfant ? me répondit-il en rougissant. Oh ! repris-je, je parle d’après un habile homme qui m’a bien envisagé, Dieu lui inspire que je ne vaux rien. Vous faites le discret ; mais je sais bien votre pensée. Cet honnête homme a dit aussi que je suis trop jeune, et que, si ces demoiselles me gardaient, cela ferait venir de mauvaises pensées aux voisins. Sans compter que le diable est un éveillé qui pourrait bien tenter mes maîtresses de moi ; car je suis un vaurien de bonne mine. N’est-ce pas, monsieur le directeur ? Je ne sais ce que cela signifie, me dit-il en baissant les yeux.

Oh ! que si, lui répondis-je. Ne trouvez-vous pas encore que Mlle Habert la cadette m’affectionne déjà trop à cause du service que je lui ai rendu ? Il y a peut-être un péché là-dessous qui veut prendre racine, voyez-vous. Il n’y a rien à craindre pour l’aînée, elle est bien obéissante, celle-là ; je pourrais rester s’il n’y avait qu’elle, ma mine ne la dérange point, car elle veut bien qu’on me chasse ; mais cette cadette fait l’opiniâtre, c’est mauvais signe, elle me voudrait trop de bien, et il faut qu’elle n’ait de l’amitié qu’envers son directeur, pour le salut de sa conscience, et pour le contentement de la vôtre. Prenez-y garde pourtant ; car à propos de conscience, sans la bonté de la vôtre, la paix de Dieu serait encore ici, vous le savez bien, monsieur le directeur.

Qu’est-ce que c’est donc que ce langage ? dit-il alors. Tant y a, lui répondis-je, que Dieu ne veut