Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/68

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Vous concevez bien que nous ne nous vîmes pas, Mlle Varthon et moi, et qu’il ne fut plus question de ce commerce étroit que nous avions eu ensemble. Elle sentit cependant la discrétion avec laquelle j’en avais usé à son égard chez Mme de Miran, et m’en marqua sa reconnaissance.

À neuf heures du matin, le lendemain, une sœur converse m’apporta un petit billet d’elle. Je l’ouvris avec un peu d’inquiétude de ce qu’il contenait ; mais ce n’était qu’un simple compliment sur mon procédé de la veille, et le voici à peu près :

« Ce que vous fîtes hier pour moi est si obligeant, que je me reprocherais de ne vous en pas remercier. Il ne tint pas à vous qu’on ignorât la part que j’ai à vos chagrins, et, malgré les mouvements où vous étiez, il ne vous échappa rien qui put me compromettre. Cela est bien généreux, et les suites de cette aventure vous prouveront combien cette attention m’a touchée. Adieu, mademoiselle. » Vous allez voir dans un instant ce que c’était que cette preuve qu’elle s’engageait à me donner.

Je répondis sur-le-champ à son billet, et ce fut la même converse qui lui remit ma réponse ; elle était fort courte ; je m’en ressouviens aussi :

« Je vous suis obligée de votre compliment, mademoiselle ; mais vous ne m’en deviez point. Je ne m’en crois pas plus louable pour n’avoir pas été méchante. J’ai suivi mon caractère dans ce que j’ai fait ; voilà tout, et je n’en demande point de récompense. »