Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1830, tome 10.djvu/7

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Jugement sur L’INDIGENT PHILOSOPHE.

Il serait difficile de faire une exacte et complète analyse de cet ouvrage ; car il se compose en grande partie de réflexions disparates, entre lesquelles l’auteur, de sou propre aveu, a pris à tâche de n’établir aucune liaison. Jamais, pas même dans son Spectateur, dont le plan comportait une allure très-libre, il ne s’était permis un tel dévergondage d’idées. Ce mot ici n’est pas trop fort, pour qualifier ce que Marivaux lui-même appelle en plusieurs endroits ses rapsodies. Et cependant, chose singulière, ces rapsodies sont intéressantes, malgré leur inconcevable pêle-mêle ; ce dévergondage plaît au lecteur, surpris et charmé de rencontrer dans une route si tortueuse, et tant de fois interrompue, vingt tableaux bizarrement contrastés, mais toujours vrais, et une foule d’observations, tantôt sérieuses, tantôt burlesques, mais toujours justes et souvent fines.

À coup sûr, l’intérêt du récit est pour peu de chose dans cet opuscule ; l’on serait même tenté de dire qu’on n’y trouve point de récit. L'Indigent philosophe se propose tout d’abord de nous raconter sa vie ; mais, à tra—