Page:Martin du Gard - Le Cahier gris.djvu/38

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— « Laissez, Madame, je suis médecin. De l’eau fraîche. Avez-vous de l’éther ? »

Bientôt Jenny revint à elle. Sa mère lui sourit ; mais les yeux de la fillette restaient durs.

— « Ce n’est plus rien », dit Antoine. « Il faudrait la faire dormir. »

— « Tu entends, ma chérie », murmura Mme de Fontanin ; et sa main, posée sur le front moite de l’enfant, glissa jusqu’aux paupières, et les tint abaissées.

Ils étaient debout, de chaque côté du lit, et ne bougeaient pas. L’éther volatilisé embaumait la chambre. Le regard d’Antoine, d’abord fixé sur la main gracieuse et sur le bras tendu, examina discrètement Mme de Fontanin. La dentelle qui l’enveloppait était tombée ; ses cheveux étaient blonds, mais rayés déjà de mèches grises ; elle devait avoir une quarantaine d’années, bien que l’allure, la mobilité de l’expression, fussent d’une jeune femme.

Jenny paraissait s’endormir. La main, posée sur les yeux de l’enfant, se retira, avec une légèreté d’aile. Ils quittèrent la chambre sur la pointe des pieds, laissant les portes entrebâillées. Mme de Fontanin