Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/181

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à la Compagnie, d’où sortaient les faveurs comme les disgrâces, mais c’est précisément à elle qu’il s’attaqua de préférence comme à l’auteur de tous ses maux. La lettre qu’il lui écrivit le 23 novembre mérite d’être reproduite presque intégralement, car nul document ne projette une lueur plus vive sur son caractère. Dupleix y a réuni, avec une rudesse peu commune, l’ensemble de ses griefs comme il a mis en lumière, sans modestie aucune, les titres qu’il pensait avoir à la reconnaissance de ses chefs :

« C’est le propre des hommes de se tromper, écrivait-il ; je me trouve dans ce cas. J’avais cru que mes services joints à leur durée auraient dû m’attirer quelque ménagement de la part de ceux qui devaient, pour bien des raisons, en avoir pour moi. Je vois avec chagrin que, bien loin d’avoir pour moi la moindre petite attention, on me fait jouer un personnage indigne en vérité de moi et de la façon dont je vous ai servi jusqu’à présent.

« Voilà donc à quoi ont abouti dix-huit années d’un travail consécutif soutenu d’un zèle inaltérable, de services essentiels ! Voilà donc la récompense que je reçois de ces services indiscutables. Je vous demande, Messieurs, avec tout le respect que je vous dois et sans être trop apologiste si des services aussi marqués n’auraient pas dû arrêter Messieurs de Pondichéry dans les termes injurieux à double entente qu’ils ont glissés dans leurs lettres[1]… Je vous avoue que je suis au désespoir d’être forcé de vous rappeler ce que j’ai fait pour la Compagnie et ce que je fais encore tous les jours… il est vrai qu’une raison doit m’y engager. C’est que je n’ai personne dans la Compagnie qui s’intéresse assez à ce qui me touche pour relever et faire valoir mes services dans l’occasion. L’on ne fait que trop voir qu’on les oublie. Je ne puis espérer de secours des employés répandus dans l’Inde. Les premiers, mes émules, me portent envie, la preuve en est visible et quelques-uns souhaiteraient que je leur

  1. Il s’agit ici de l’affaire des roupies de Mourchidabad.