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et 101 d’argent à l’effigie du nouveau souverain[1].

Mais bientôt on sut que Nadir Cha s’était contenté de piller la ville de Delhi, d’enlever les trésors du Mogol et d’imposer de lourdes contributions et qu’il était retourné en ses états. Mohamed Cha resta en conséquence Grand Mogol, ce qui ne veut pas dire un grand monarque. On peut au contraire affirmer que du jour où il subit l’humiliation des Persans, le pouvoir de la dynastie avait disparu et que l’heure était venue pour les grands seigneurs de réaliser chacun en leur gouvernement une indépendance effective sous le couvert d’une vassalité nominale. Ce fut le premier échec réel porté au prestige de la puissance indoue ; la chute de cette puissance s’effectuera ensuite très naturellement. Et Dupleix put dire avec raison qu’après tant d’arrogance la chute du Mogol paraîtrait dans l’avenir un « paradoxe » sans précédent.

Nadir Cha partit de Delhi le 15 mai. Nul ne le regretta. Les cruautés qu’il avait commises avaient entouré son nom d’une telle terreur que le Grand Mogol pouvait par opposition être considéré comme un souverain doux et bienveillant. Cependant si son autorité se fut effectivement établie dans l’Inde, elle eut peut-être été plus favorable à nos intérêts que l’anarchie qui prévalut et nous conduisit dix-huit ans plus tard à la perte de tous nos comptoirs. La tolérance dont il fit preuve en nous laissant l’année suivante fonder un comptoir à Bender-Abbas, en ses propres états, justifie cette supposition. Mais qui pouvait prévoir les dangers qu’allait nous créer l’affaiblissement de l’empire mogol ? Dupleix lui-même ne se rendait pas compte qu’un pouvoir fort régnant sur

  1. Le nombre fut si restreint qu’il fut impossible à Dupleix de se procurer autre chose qu’une simple empreinte, qui fut envoyée à Pondichéry.